La sculpture africaine.
La
sculpture n'est pratiquée, à grande échelle, que dans
les sociétés sédentaires, vivant des fruits de la terre.
L'Afrique n'échappe pas à cette règle : les nomades,
essentiellement musulmans, obligés de transporter en permanence l'ensemble
de leur mobilier et leurs dieux ne sculptent guère… On a tendance à croire
que la sculpture demande une certaine stabilité des conditions de
vie en société et l'existence de cultes compatibles avec la
représentation
des dieux.
La
sculpture africaine frappe d'abord par la grande diversité des matériaux
qu'elle a utilisée pour rendre des formes tout aussi variées.
La statuaire et le masque en sont les deux grands genres. La statuaire en particulier
s'est exprimée dans des matériaux aussi divers que le bois,
les alliages cuivreux ou tout simplement l'argile cuite, l'ivoire et
l'os ou la
pierre. Les tailles varient elles aussi grandement.
Le corps de l'homme, seul ou associé à un animal comme le cheval,
en est le principal thème. Dans chaque cas, la maîtrise technique
est réelle : les alliages cuivreux par exemple nécessitent une
bonne connaissance des températures de fusion des différents
métaux et les proportions dans lesquelles les mélanges doivent être
fait. Il y faut aussi la maîtrise du feu et de la source d'énergie.
Des raisons diverses ont poussé au choix du matériau. Le bois
par exemple est choisi non pas seulement à cause de sa résistance
mais aussi pour des raisons rituelles dictées par la tradition. Il est
probable que la dureté ait guidé le choix de la pierre, de l'os,
de l'ivoire ou du fer. Les alliages cuivreux ont probablement été choisis
parce qu'ils ont la couleur de l'or rare dans certaines régions
; mais ils brillent comme lui quand on les polit.
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Sculpture Sapi
Sierra Léone
XVè s.
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Sculpture
Baloué
Côte d'Ivoire XIXè s. |
Sculpture Nuna
Burkina Faso XVIIIè s. |
La
statuaire africaine se caractérise par sa frontalité : la
plupart du temps, on peut la diviser en deux à partir d'une ligne médiane.
Il existe cependant des exceptions où l'asymétrie est la règle
de construction. Une autre caractéristique de cette statuaire est la
prépondérance accordée à la tête : elle fait
le tiers ou le quart de toute la pièce, non pas parce que l'artiste
n'a aucune connaissance des proportions mais parce que dans la plupart des
cultures africaines, la tête est si importante qu'il existe des cérémonies
particulières pour le faire comprendre. Les deux grandes tendances en
art, le naturalisme ou l'abstraction, s'expriment aussi dans cette statuaire, à des
degrés qui varient d'un "centre de style" à un autre.
On peut en dire autant des masques. En principe, ils ne représentent
que la tête. Mais les formes de celle-ci sont non seulement différentes
d'une région à une autre mais même parfois dans le même
groupe socio-linguistique. Il n'est pas exclu que la façon de les porter
- couvrant la face ou la tête - aient été pris en compte
par le sculpteur soucieux de ce qu'il donnerait ainsi à voir au spectateur.
Les
sculpteurs africains utilisent, sur l'ensemble du continent, les mêmes
techniques à quelques détails près. Tout d'abord, la plupart
d'entre eux travaillent en s'isolant de la foule. Ils s'entourent de secret
ou de solitude ; on sait qu'ils facilitent la concentration. Mais une autre
raison les y contraint : souvent leur commande relève du sacré et
de l'initiation auxquels tout le monde n'a pas accès. Les outils sont
presque toujours les mêmes : la hache pour abattre le bois, des herminettes
de différentes tailles, des ciseaux de plus en plus fréquents,
et parfois des poinçons pour perforer. Il n'est pas rare que le sculpteur
ait aussi des connaissances de forge si bien qu'il lui est facile d'utiliser
le feu pour parfaire sa création. La finition demande que les surfaces
soient polies ; elles l'étaient traditionnellement par des feuilles
d'arbres ; aujourd'hui, le papier de verre est connu de tous. La couleur est
souvent utilisée. Autrefois, les pigments végétaux ou
des substances minérales en étaient les principales composantes
; aujourd'hui, peu de sculpteurs même de pièces traditionnelles
les connaissent et l'on préfère recourir aux peintures chimiques
disponibles dans toutes les grandes villes et sur tous les marchés.
La sculpture africaine a aussi recours à la technique additive pour
obtenir des volumes dans la poterie et les modelages en terre propres à exprimer
les personnages et les divinités de certains panthéons. La
technique additive permet sans doute une plus grande souplesse dans les transformations
et les modifications.
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Sculpture
Dogon
Mali XVIII-XIXè s.
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Sculpture
Dogon
Mali XIVè s.
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Sculpture
Téké
Congo XIXè s.
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Le secret du travail
nocturne permet peut-être
de faire preuve d'une plus grande habileté manuelle. La plupart des
artistes en Afrique croient en l'aide d'un être supranaturel responsable
en partie de leur inspiration, de leur habileté technique et de
leur don.
Toutes ces considérations font que l'artiste est souvent dans les sociétés
africaines, un individu un peu en marge, de qui on tolère les "caprices" et
les excentricités. Il est certes tenu par les règles d'appréciation
de la pièce élaborée par sa société,
mais il a aussi le droit d'innover et de surprendre. La
statuaire et le masque, ont toujours été associés à des
rites religieux ou initiatiques. On peut sans se tromper affirmer que le masque
permettait la personnification d'une divinité ou d'une entité d'un
autre plan ; le porteur du masque se met au service de cette force supérieure
et en traduit la volonté à travers les mouvements et gestes qu'il
fait. L'accoutrement sans lequel le masque est incomplet aide à ce déguisement
et même si les initiés ne se trompent pas sur l'identité réelle
du danseur, ils admettent qu'il peut être "possédé" pendant
le temps du port du masque, il est un autre homme et signifie bien que les
dieux aussi ont besoin des hommes pour se faire entendre et voir. Jamais le
masque n'apparaît sans que les dieux ne le souhaitent.
Les statues sont le plus souvent la personnification d'ancêtres disparus,
immortalisés de cette façon. Cet art est hautement symbolique
; il faut en permanence l'interpréter en se référant à la
connaissance que l'on peut avoir de la société qui l'a créé.
Au delà de la forme, il faut entendre un discours qui pour l'essentiel
transcende la société elle-même mais qui la rassure et
lui permet de continuer à vivre dans le présent.
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Sculpture Kota
Gabon
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Sculpture Yangéré
République Centrafricaine
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Sculpture
Kongo
Congo.
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